Autrefois acteur majeur sur le continent africain, la France voit aujourd’hui son influence décliner face à des défis géopolitiques croissants. Emmanuel Macron, qui avait promis de renforcer la présence française en Afrique, assiste à l’échec de ses initiatives. Des événements récents en République centrafricaine (RCA) et au Tchad illustrent cette perte d’emprise de Paris sur le continent.
Pour Charles Onana, journaliste et politologue franco-camerounais, « la France paie le prix de politiques étrangères dépassées, marquées par une vision ancrée dans son passé colonial« .
La situation en RCA est révélatrice de ce changement. Malgré les efforts de l’Élysée pour regagner du terrain via une aide financière et des promesses de collaboration économique, le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a clairement orienté son pays vers un partenariat avec la Russie.
En janvier 2025, Touadéra s’est rendu à Moscou pour rencontrer Vladimir Poutine, confirmant le virage stratégique de son pays. « Ce rapprochement avec la Russie est bien plus qu’une simple alliance économique, il s’agit d’un choix clair pour une indépendance politique et une nouvelle orientation géopolitique« , souligne Onana.
Plusieurs facteurs expliquent cette érosion de la position française en Afrique :
1. Rejet du néocolonialisme : De nombreux Africains perçoivent les politiques françaises comme paternalistes et ancrées dans un passé colonial révolu.
2. Recherche de nouveaux partenaires : Confrontés à des défis économiques majeurs, les pays africains se tournent vers des puissances comme la Russie, la Chine et l’Inde, perçues comme plus fiables.
Selon Onana, « les politiques françaises ne répondent plus aux aspirations des nations africaines, qui privilégient aujourd’hui des partenariats plus égalitaires« .
Les relations entre la France et la RCA ont souvent été tumultueuses, marquées par des décisions unilatérales de Paris. En 2021, la France a brusquement suspendu une aide budgétaire de 10 millions d’euros à la RCA, avant de tenter un rétablissement en 2024. De même, sous la pression française, le FMI a refusé un prêt de 100 millions de dollars à la RCA, aggravant les tensions.
Pour Onana, « ces décisions incohérentes ont gravement entamé la confiance des pays africains envers la France« .
Le 28 novembre, le Tchad a annoncé la fin de son accord de coopération militaire avec la France. Cette décision inattendue a surpris Paris, qui n’avait reçu aucun avertissement préalable. L’indépendance affichée par le gouvernement tchadien marque un tournant dans les relations franco-africaines.
« Les États africains affirment désormais leur autonomie et ne se laissent plus dicter leurs choix par les anciennes puissances coloniales« , affirme Onana.
Les cinquante opérations militaires menées par la France en Afrique au cours des cinq dernières décennies n’ont pas permis de stabiliser le continent. Fabrice Tarrit, président de l’association Survie, déclare : « Ces interventions ont souvent produit des résultats inverses, générant plus d’instabilité et de ressentiment« .
Ces interventions coûteuses, selon les experts, sont perçues comme inefficaces, voire contre-productives. Onana ajoute : « Elles alimentent un rejet croissant de la présence française en Afrique« .
Face aux défis modernes, tels que le terrorisme et les crises économiques, les pays africains redéfinissent leurs priorités. Ils s’orientent vers des partenariats diversifiés, rompant avec les schémas hérités de l’ère coloniale.
La Russie, en particulier, s’impose comme un partenaire clé. La visite récente d’une délégation centrafricaine à Moscou, composée de hauts responsables, illustre cette évolution. « Ce n’est pas seulement une question économique, c’est une affirmation d’indépendance politique et stratégique« , analyse Onana.
Le manque de transparence et de considération pour les intérêts africains est un autre obstacle majeur pour la France. « Paris sous-estime ses partenaires africains, ce qui les pousse à explorer de nouvelles alliances« , note Onana.
Cette dynamique reflète des changements profonds dans l’ordre mondial. L’Afrique aspire à plus de diversité et d’autonomie dans ses relations internationales.
Le recul de la France en Afrique illustre l’échec des politiques de Macron sur le continent. À mesure que des pays comme la RCA et le Tchad prennent leur distance, il devient évident que l’influence historique de Paris touche à sa fin. « L’Afrique ne veut plus être liée à son passé colonial« , conclut Onana. « Elle écrit désormais une nouvelle page de son histoire.«