La fin du second et dernier mandat constitutionnel du président Patrice Talon au Bénin, donne lieu à un mélimélo d’un pouvoir qui se refuse d’accéder à l’ordre normal des choses.
Passée la tournée gouvernementale de reddition de compte dans les communes en mai dernier, annoncée être un bilan à mi-mandat, l’initiative a été prorogée dans les arrondissements. La vague d’inaugurations des marchés ‘’modernes’’ attendue depuis plus d’un an qui a suivi, s’est enchainée d’une reddition de compte télévisuelle fait d’un ballet de ministres du gouvernement.
Une stratégie qui laisse poindre légitimement des doutes sur les réelles intentions du locataire du palais de la Marina, quand bien même un de ses proches ‘’jure’’ de ce qu’il passerait à autre chose après mai 2026.
Le 10 juillet 2021 dans la salle bleue du Palais des Congrès de Cotonou, lors du sommet citoyen ouest-africain sur la bonne gouvernance, l’alternance et la démocratie, Talon a pris l’assistance à témoin pour passer le relais, le troisième dimanche de mai 2026, à celui qui aura la confiance du peuple béninois. Certains se rappellent tout de même qu’il avait annoncé de faire un quinquennat sec, quelqu’en soient les circonstances pour monter que c’est possible de «Â faire le job » en cinq ans, et finira plus tard par «Â aviser ».
Logique illogique ?
En décembre 2023, Talon a annoncé sa volonté de ne pas rester inactif quant à sa succession en 2026 à la tête du Bénin. Ce pays d’Afrique de l’Ouest qui a fait l’option de la démocratie depuis 1990, avec la limitation des mandats présidentiels. Au terme d’un second et dernier mandat constitutionnel d’un chef d’Etat en exercice, la logique et la meilleure manière démocratique est de mettre sur orbite son, ou ses dauphins.
A défaut de rester en marge de la course, la tradition est d’en promouvoir, en les positionnant à des postes stratégiques, dans un gouvernement ou une institution, afin de leur permettre de s’exprimer et donner la preuve de leurs aptitudes. De quoi révéler leurs atouts d’Homme d’Etat, loin des clivages partisans.
Face au climat délétère qui court dans le pays, le code électoral à polémique adopté en mars dernier au Bénin, est pointé du doigt comme donnant libre cours au locataire de la Marina, pour rouler en roue libre, à quelques mois de la fin de son mandat. Mais une loi électorale, fut-elle présentée comme couvant les germes d’une main mise, tel que décrié par l’opposition et les inquiétudes des observateurs, passé un moment ne pourra assurer de tout contrôler. Car il y a une limite à tout, même au «pouvoir de l’illimité».
Mieux, en cas manifeste de jeu équitable, cette logique qui a cours avec de potentiels Jokers, qui squattent le champ de partis politiques sans grands impacts sur des enjeux nationaux, et le quotidien de populations, reste suicidaire.
Priorité aux vieilles recettes ?
Avec deux principaux partis nés du cÅ“ur du pouvoir et satellites pour soutenir ses actions, Talon a pu s’offrir une gouvernance sans partage suite aux législatives exclusives de 2019, qui ont accouché d’un parlement «monocolore». En 2021, il a réussi à se succéder à lui-même à la présidentielle sans grandes difficultés malgré les tensions.
En 2023, la recette des suspens lui a permis d’avoir une majorité confortable au parlement, face à une minorité de blocage de révision de la constitution.
Cependant, permettre à ses soutiens de conserver le pouvoir d’Etat en douce, relève de tout autre chose. Surtout quand on sait que la logique d’un chef d’Etat en fin de mandat constitutionnel, n’est pas la même que celle d’un chef d’Etat en lice, candidat à sa propre succession.
Complexe de fin de mandat ?
Bien que la période de campagne électorale soit encadrée, les populations ont besoin de voir clair dans les intentions et connaître d’avantage ceux qui aspirent les diriger. Lancer le débat national de l’après 2026, avant le faste des «votez pour moi».
Face aux différents constats qui s’observent sur l’échiquier politique béninois, plusieurs questionnements s’entremêlent sur la fin de mandat de Talon, sans grandes intentions déclarées de candidatures, ni de perspectives, à un peu plus d’un an et demi de la descente.
Volonté manifeste de garder le contrôle jusqu’au bout ou peur du principe d’Å“dipe, face à l’idée de se voir détrôner par son dauphin ou un de ses adversaires politiques ?
A l’évidence une mauvaise négociation de ce tournant, reste souvent sans appel. Fut-elle une alternance dans la continuité ou la rupture. Mieux, de préférence, il conseillé de savoir quitter les choses, avant qu’elles ne vous quittent.