Lorsqu’on amorce ce virage au terme d’un quinquennat, l’ultime d’un chef d’Etat sous nos cieux, il y a des logiques et des signes qui ne trompent pas.
A l’heure où la tension est vive entre le Niger et le Bénin ; où des populations se plaignent de la cherté du coût de la vie ; où le climat sociopolitique est énigmatique d’un calme avant la tempête, le gouvernement béninois effectue une tournée de reddition de compte.
Décidée lors de la récente assise entre élus de la mouvance et membres du gouvernement au palais des Congrès à Cotonou, ces échanges directs devraient permettre d’entretenir les populations à la base sur les mesures, actions, réalisations à mi-mandat du président Patrice Talon ainsi que des projections sur le reste du quinquennat. Aussi, répondre à leurs préoccupations ou les recenser.
Mais comme l’a lâché au terme du conclave qui en a jeté les bases, son objectif semble bien loin de l’écoute des populations que d’une volonté d’occupation du terrain. Et cela n’aura pas raté.
Des levées de boucliers dès les premières heuresÂ
Aussitôt démarrée que des voix se sont levées sur la clé de répartition des participants qui attribue 75% aux partisans et 25 % provenant des couches socio-professionnelles. Une information qui n’a pas été démentie jusqu’ici alors qu’il s’agit d’une tournée gouvernementale de reddition de compte.
Que les populations soient converties en partisans et qu’à peine il n’y ait qu’une proportion congrues dans les 25 % qui soient des citoyens lambda, cela laisse à désirer et augure de ce qu’on est loin d’échanges à micros ouverts pour une lecture plus ou moins objective sur ce qui est, ce qui sera et recueillir des attentes pertinentes. La propagande aura pris le pas sur l’enjeu, d’un dialogue avec les communautés à la base. Alors qu’il y a encore à peine quelques jours au motif de la cherté du coût de la vie des centrales syndicales et leurs syndiqués battaient finalement le macadam, après une coordination de mouvements sur l’ensemble du pays étouffés dans l’Å“uf.
Pour des activités officielles du gouvernement, beaucoup attendaient mieux. Le dialogue étant le début de solution à toute situation. A moins que les gouvernants continuent de nier qu’il y en a, tout en s’évertuant d’en mettre plein la vue et les oreilles aux gouvernés.
Ces signes qui ne trompent pas
Les deux décrets portant sur la nomination des ministres conseillers à la Présidence de la République attaqués devant la Cour constitutionnelle prévoient ce rôle dévolu à cette tournée. Et devraient appeler à des nominations, dont la procédure fait partie des griefs des recours, sauf cas de sa déclaration non conforme à la constitution, comme soulevé également.
En effet, le décret n o 2024 – 006 du 09 janvier 2024 portant création, attributions, organisation et fonctionnement du Collège des ministres conseillers à la Présidence de la République, précise en son article 3 le rôle qui leur est dévolu.
Au nombre desquels, contribuer à la préparation des discours politiques dans lesquels il fait valoir les idées, les options et les opinions du Gouvernement, de manière à informer la population et à lui expliquer certaines prises de position du Gouvernement ; se renseigner et prend en considération tous les éléments d’une situation donnée afin d’être en mesure de proposer des solutions pertinentes au chef de l’Etat …
Des retours d’informations, il est aisé de constater que chaque acteur engagé que ce soit un membre du gouvernement ou responsable de parti de la mouvance, fait valoir son argumentaire dans cette logique et se fait valoir par la même.
Cela témoigne sans doute d’une scène de challenge pour de potentiels jokers lâchés au milieu d’une foule.
Toutefois, l’exercice a le mérite de sortir le gouvernement du palais feutré de la Marina pour toucher du doigt les réalités que vivent les populations au quotidien. Offrir des ressources à quelques prestataires sevrés depuis lors et faire tourner en partie l’économie via les fonds qui seraient injectés dans l’organisation des rencontres, et autres activités connexes qui s’animent autour des rassemblements de ce type.
Mais plus que de belles paroles puisque les populations voient et ne nient pas qu’il y ait par endroit des actions, elles attendent des actes. Et tant qu’il reste à faire, c’est qu’il reste à parfaire, les attentes étant de l’ordre du quotidien. Notamment, résoudre l’équation à multiples inconnus de s’assurer au moins un repas par jour. Et pour cela, point n’est besoin d’aller au fin fond du pays pour s’en convaincre.
A ce sujet, le climat social dans les grandes villes en dit long. Bien que des localités de l’intérieur pays sont le plus souvent sevrées de la présence des gouvernants à leurs côtés. Et les animations et autres apparats qu’offrent ces rencontres ne sont que l’expression de l’hospitalité propre aux communautés. Puisqu’à celui qui vient on resserve tout ce qui reste pour lui assurer un parfait séjour. Espérant qu’à son départ il garde la belle image de la dignité des gens, qui malgré tout luttent debout.
Un remaniement en perspective !? …
La dynamique du gouvernement Talon, si tant est qu’elle s’est engourdie, il y a des recettes à cette situation. Au nombre de celles-ci un remaniement. Mieux les enjeux de 2026 appellent à une redynamisation de l’action gouvernementale au Bénin. Au risque d’un délitement qui finalement risque d’être contreproductif pour la mouvance et ses perspectives.
Une tournée gouvernementale, bien que légitime, pour certains l’urgence semble ailleurs. Combien cela va-t-il coûter au contribuable qui attend moins de discours que du concret pour le quotidien ?
Les retours à renfort de communication sur le lancement de travaux de réalisations d’infrastructures ont déjà commencé par témoigner d’une cadence autre que celle qui a cours jusqu’ici depuis 2016, avec comme interrogation, qu’est-ce qui n’a pas marché ?
La verve et les déploiements qui ont cours sont évocateurs. Que ce soit les prémices d’un remaniement, ou de composition de tickets pour 2026 si loin et si proche, ou une occupation du terrain, le dossier de ministres conseillers étant dans le statuquo, on peut souhaiter bon challenge à tous en attendant. Mais avant, plus de concret pour les populations. Ventre affamé n’a point d’oreilles.